Les Européens décidés à coopérer davantage

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L’adoption et la mise en œuvre des outils de lutte contre le terrorisme devront être accélérées

 

Sécurité : après les attentats de Bruxelles, les Européens décidés à coopérer davantage

Les ministres de l’Intérieur se sont réunis jeudi en urgence jeudi afin d’exprimer leur solidarité avec la Belgique et de faire point sur la lutte anti-terroriste. Les attentats de Bruxelles ont une nouvelle fois confirmé les défaillances de la sécurité au niveau national mais aussi celles dans l’échange de renseignements au niveau européen. Plusieurs propositions attendent toujours le feu vert des gouvernements, comme le corps européen de gardes-frontières, ou des eurodéputés, comme le fichier « PNR ». C’est devenu une habitude. A chaque attentat, « l’Europe » est accusée de ne pas être capable d’assurer la sécurité de ses citoyens. Les critiques ont une nouvelle fois fusé ces derniers jours, au lendemain des tragiques événements de Bruxelles. Mais ses auteurs oublient, ou font mine d’oublier, que dans ce domaine la réalité est infiniment plus complexe : d’un côté, la nature transfrontière du terrorisme nécessite une intervention de l’UE ; de l’autre, la sécurité intérieure continue à relever de la compétence exclusive des Etats membres. Le député européen Arnaud Danjean, spécialiste des questions de défense, a été l’un des rares à s’en agacer, ces dernières heures.

Les ministres de l’Intérieur de l’UE, réunis jeudi en urgence à Bruxelles, ont préféré remiser les éternelles querelles et mettre l’accent sur la nécessité d’avancer, ensemble et rapidement, sur les différents dossiers en souffrance. L’exécutif européen les avait renvoyés la veille à leurs responsabilités. « Je continue à croire que si tous les gouvernements avaient suivi dans leur sagesse les propositions de la Commission, la situation ne serait pas celle que nous constatons aujourd’hui », avait déclaré son Président Jean-Claude Juncker, lors d’une conférence de presse commune avec le Premier ministre Manuel Valls.

Plusieurs textes attendent en effet le feu vert des Vingt-Huit, comme la création d’un corps européen de gardes-frontières ou le durcissement de la législation sur le commerce des armes à feu, qui fait l’objet d’un intense lobbying.

D’autres propositions sont dans les mains du Parlement européen. C’est le cas du contrôle coordonné et systématique des voyageurs lors du franchissement des frontières extérieures, ou du fameux « PNR » européen, le registre des données des passagers aériens, que la gauche et les libéraux du Parlement européen veulent adopter en même temps que la directive sur la protection des données, moins urgente. Le vote pourrait finalement avoir lieu dans les toutes prochaines semaines : il sera en effet difficile pour les eurodéputés de résister plus longtemps à la pression, même si certains d’entre eux rappellent que les Etats se sont opposés à la création d’un véritable fichier européen.

Atermoiements. « On ne peut pas être sur ces sujets-là dans les atermoiements, il ne peut pas y avoir des atermoiements après les atermoiements. Il y a urgence et nous souhaitons désormais que l’Union européenne, dans la totalité de ses institutions, avec la volonté de tous les Etats, puisse prendre des décisions qui s’imposent », a déclaré le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve. Ce dernier insiste aussi sur la création d’une task force européenne spécialisée dans la lutte contre les faux documents, alors que Daech dispose de passeports vierges en Irak, en Libye et en Syrie et a monté « une véritable industrie du faux document ».

Les Vingt-Huit devront surtout accepter de coopérer davantage pour éviter de répéter les errements qui ont facilité les attentats de ces derniers mois. Comment ? En multipliant les échanges entre les services de renseignement, en alimentant de manière beaucoup plus systématique les fichiers d’Europol et du Système d’information Schengen (SIS, qui regroupe toutes les personnes recherchées ou placées sous surveillance), en assurant l’interopérabilité des différentes bases de données, en multipliant les équipes d’enquête conjointes. Ils devront pour cela vaincre leur défiance mutuelle. Quant à la création d’une agence européenne du renseignement évoquée par certains responsables politiques, elle n’est pas pour demain. Ni, sans doute, pour après-demain.

 

Par Isabelle Marchais sur le site internet - L'Opinion

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