Le « Non » britannique plonge l’Europe dans l’inconnu

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Le choix des Britanniques de sortir de l’Union inflige un désaveu cinglant à l’Union européenne qui va avoir le plus grand mal à rebondir.

 

Le choix des Britanniques de sortir de l'Union inflige un désaveu cinglant à l'Union européenne qui va avoir le plus grand mal à rebondir. C'est le troisième coup porté à l'Union européenne. Mais à la différence de la crise économique, venue des Etats Unis et de la crise des réfugiés, celle-ci vient de l'intérieur. La claque politique que viennent d'infliger les Britanniques au projet européen n'en est que plus douloureuse.

Un pied dedans, un pied dehors

Bien sûr, le Royaume Uni a toujours fait figure d'exception en Europe. Un pied dedans, un pied dehors, son euroscepticisme comme étendard, il a imposé à ses voisins un statut à part, à base d'opt-outs et de dérogations à la règle commune. L'île n'était pas dans l'euro ni dans l'espace Schengen. Mais cela ne change rien au fait que pour la première fois, l'Union européenne est reniée par le peuple de l'un de ses principaux Etats membres. Les Européens ne pourront pas faire comme si le virus anti-européen était circonscrit au Royaume-Uni. En fait il a déjà contaminé le continuent.

Au delà du parti anti-européen de Nigel Farage, UKIP et d'une large portion des conservateurs europhobes, c'est toute l'Europe qui est aux prises avec des partis hostiles à Bruxelles, les institutions européennes catalysant toutes les rancoeurs contre la mondialisation, l'immigration et les élites. Nigel Farage ne pouvait pas mieux dire jeudi matin : « Nous l'avons fait pour l'Europe entière ! ».

Partis populistes prêts à l'offensive

Les partis populistes qui ont fleuri sur le continent depuis 10 ans sont prêts à l'offensive. Dès 6 heures du matin, ce vendredi, Geert Wilders, le leader du Parti de la Liberté, a déclaré « Maintenant c'est notre tour ! L'heure est venue d'un referendum aux Pays-Bas ». L e Front national de Marine Le Pen a lui aussi fait part de son souhait que « dans chaque pays » se tienne un vote populaire sur l'appartenance à l'Union , à l'unisson des eurosceptiques danois et suédois.

Face à de telles pressions, quelle peut-être la réaction des dirigeants européens ? Le désaveu du peuple britannique qui intervient au pire moment pour l'Europe ne saurait se traduire par un nouvel élan politique. Ce serait « idiot », a dit le ministre des Finances Wolfgang Schäuble . Les Vingt-Sept vont plutôt tenter de rester unis, de rassurer en renouvelant leur désir commun de poursuivre l'aventure européenne; mais ils se garderont probablement de toute initiative majeure qui pourrait être considérée comme déplacée après le résultat du référendum britannique.

« L'Europe en a fait trop ! »

L'Europe oui, mais à condition que ses missions soient recadrées et qu'elle se montre utile et capable d'apporter des réponses concrètes aux problèmes posés par l'immigration, les réfugiés, l'insécurité extérieure et le terrorisme. Jean-Claude Juncker le président de la Commission européenne l'a dit récemment : l'Europe en a fait trop !, dans une allusion à ce qui est présenté aujourd'hui comme une ingérence excessive de l'Union dans les systèmes nationaux.

La crise peut-elle être mortelle pour l'Union européenne ? Donald Tusk, le président du Conseil européen a peut-être un peu forcé le trait cette semaine: « Je crains qu'un Brexit puisse marquer non seulement le début de la destruction de l'UE, mais aussi de la civilisation occidentale », a-t-il dit au quotidien Bild.

Elan brisé pour l'Europe

A la période d'incertitude ouverte par la sortie du Royaume Uni, va en tout cas correspondre une phase d'instabilité en Europe, qui risque de briser son élan. Le président Hollande, le plus « allant » des dirigeants européens sur cette question, a plaidé jeudi pour une Union en mesure d' « assurer d'abord sa protection, sa sécurité, sa défense », de se doter d'« institutions plus simples, plus rapides » et de « coopérations renforcées » entre ses Etats membres désireux d'avancer plus vite. Mais l'Allemagne se montre réticente à des propositions qui risqueraient de diviser les Etats qui restent dans le club.

Entre une Europe à la carte, où chacun choisirait son degré d'attachement aux institutions et une Europe à plusieurs vitesses, les options sont nombreuses, pourvu qu'il y ait une volonté politique. C'est ce qui fait le plus défaut aujourd'hui dans une Europe désormais amputée.


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