L'UE veut éviter l'explosion de l'espace Schengen
La Commission propose une feuille de route pour un retour à la normale de la libre circulation des personnes – un pilier de l’Union – d’ici au 31 décembre 2016. A présent, huit Etats ont introduit des mesures restrictives.
La peur que Schengen, cet espace de libre circulation entre 26 pays européens, la Suisse comprise, puisse se désintégrer hante l’Union européenne (UE). D’autant plus qu’une telle perspective est tout à fait imaginable. Huit pays ont déjà introduit des mesures restrictives unilatérales dans le sillage de la crise des réfugiés. Autorisées dans des situations exceptionnelles, celles-ci sont toutefois limitées et temporaires. Dès lors, la Commission a présenté vendredi une feuille de route pour un retour à la normale d’ici au décembre 2016 au plus tard.«L’espace Schengen est l’une des réussites les plus appréciées de l’intégration européenne et le prix de la désintégration serait colossal», a rappelé Frans Timmermans, vice-président de l’exécutif européen. En cas de retour des contrôles aux frontières, des Etats tels que la Pologne, les Pays-Bas et l’Allemagne devraient supporter, selon des estimations données hier par la Commission, un surcoût de plus de 500 millions d’euros par an rien que pour le transport routier de marchandises. Les travailleurs frontaliers et les entreprises qui les emploient perdraient entre 2,5 et 4,5 milliards d’euros par année à cause du temps supplémentaire passé aux douanes. Au moins 13 millions de nuitées touristiques seraient perdues pour un manque à gagner de 1,2 milliard d’euros pour cette industrie. Autre dégât: les Vingt-Huit devraient consacrer au moins un milliard d’euros pour augmenter les effectifs afin d’assurer le contrôle aux frontières, sans compter de la nécessité de réaménager les aéroports et autres points de passage.«La libre circulation à l’intérieur de l’espace Schengen passe nécessairement par la protection de nos frontières extérieures», a déclaré le commissaire Dimitris Avramopolos en charge de la Migration et de l’Intérieur. Ainsi, sur la feuille de route pour sauver Schengen, la mise en place du Corps européen de garde-frontières et de garde-côtes occupe une place importante. Le principe a déjà été accepté par les Vingt-Huit. La Commission attend le feu vert du Parlement européen au plus tard en juin. Elle entend rendre le service opérationnel à partir d’août prochain. Le 31 décembre est l’échéance pour éliminer toutes les mesures restrictives à l’intérieur de l’espace Schengen.La Commission reconnaît que la maîtrise du flux migratoire – 1,2 million de demandeurs d’asile sont arrivés en Europe en 2015 – reste un défi majeur au principe de la libre circulation. Dans ce contexte, la Grèce, premier pays d’accueil, occupe une bonne place sur la feuille de route. Accusée de n’avoir pas assumé ses responsabilités, Athènes doit fournir chaque mois un rapport sur la mise en œuvre des recommandations de la commission adressées le mois dernier: notamment la mise en place de hotspots pour trier et enregistrer les réfugiés. Si la Commission constate toujours des manquements en mai, elle pourrait décider alors d’introduire des contrôles temporaires aux frontières extérieures de la Grèce.Pour sa part, la Commission présentera un rapport final le 16 mai sur les engagements des pays en matière de relocalisation des réfugiés se trouvant en Italie et en Grèce. On sait que ce programme peine à décoller. Une décision sera prise à la lumière du bilan.Le 16 mars, la Commission présentera une réforme de l’accord de Dublin selon lequel les demandes d’asile soient traitées dans le premier pays d’accueil. Cette disposition a explosé l’an dernier au moment où la chancelière Angela Merkel a décidé d’ouvrir grandes les portes de l’Allemagne aux réfugiés syriens et irakiens.