Mary Honeyball : « Il y a un vrai besoin de protéger les femmes réfugiées »

 

Le Parlement européen a décidé de consacrer la journée internationale de la femme 2016 aux réfugiées et demandeuses d'asile. À cette occasion, nous avons rencontré deux spécialistes de la question : la députée démocrate socialiste britannique Mary Honeyball, rapporteur d'un texte sur ce sujet, et la photographe française Marie Dorigny, qui s'est rendue en Grèce, dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine et en Allemagne pour produire un reportage autour de la situation de ces femmes.

 

 

De gauche à droite : la photographe française Marie Dorigny et la députée britannique Mary Honeyball

La guerre, les violations des droits de l'homme et la pauvreté dans certains pays ont pour conséquence une augmentation du nombre de réfugiés en Europe. À quoi ressemble la situation pour les femmes ? 


Mary Honeyball : Un très grand nombre de femmes sont victimes d'actes de violence, non seulement dans leur pays d'origine mais aussi au cours de leur voyage. Il y a un vrai besoin de protéger les femmes et les enfants. Les femmes ont des besoins différents des hommes.

 

Les chiffres montrent qu'en 2015, davantage d'hommes que de femmes et d'enfants sont entrés en Europe. Comment expliquer cela ? 

 

Mary Honeyball : Les derniers chiffres montrent en fait que ce sont désormais les femmes qui arrivent en plus grand nombre en Europe. Les hommes sont les premiers à partir car ils sont envoyés en Europe pour savoir à quoi ressemble la situation là-bas, avant que leur famille ne les rejoigne. Les femmes et les enfants arrivent donc ensuite.


Marie Dorigny : Les dernières données de l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés montrent que les femmes et les enfants représentent actuellement jusqu'à 55 % des réfugiés qui arrivent en Europe.


Quels sont les risques auxquels les femmes et les filles sont exposées au cours de leur voyage ? 

 

Mary Honeyball : Il y a la violence qu'elles fuient, et puis la violence au cours de leur voyage, souvent de la part des passeurs et des trafiquants, mais malheureusement parfois aussi de la part d'autres réfugiés. Il s'agit d'une situation de violence en soi. Les femmes sont particulièrement vulnérables quand elles voyagent seules.


Marie Dorigny : Le visage de la migration a changé au cours de ces six derniers mois. Il y a de plus en plus de familles qui fuient l'Irak, l'Afghanistan et la Syrie. Parmi ces familles, la moitié des personnes sont des femmes avec leurs enfants. Elles sont en quelque sorte mieux protégées qu'auparavant, car elles voyagent avec l'ensemble de la famille : un père, des frères, des fils…


Ces femmes traversent donc de nombreuses épreuves dans leur pays d'origine, de transit et de destination. Que faire pour mieux les protéger ?

 

Mary Honeyball : Le travail de sensibilisation est primordial : les gens doivent savoir ce qui se passe. Ce genre de pression peut faire changer les choses. Nous devons notamment faire en sorte que les centres d'accueil soient gérés correctement.


Avez-vous rencontré ces femmes et connaissez-vous leurs histoires ? 

 

Marie Dorigny : J'ai constaté en décembre et en janvier que les gens ne faisaient souvent que traverser : vous les voyez arriver puis repartir. La plupart d'entre eux ne parlent pas anglais. Le manque de traducteurs dans les camps de transit est un vrai problème.


Mary Honeyball : Beaucoup de personnes parlent en fait des dialectes régionaux que peu de gens peuvent traduire. La traduction est un aspect absolument essentiel, et nous devrions peut-être travailler davantage sur ce sujet.


 

Portrait de Marie Dorigny La photojournaliste française Marie Dorigny 

 

Marie Dorigny : Parmi les femmes que j'ai photographiées qui venaient d'arriver de Turquie par bateau, beaucoup étaient enceintes. Un grand nombre d'entre elles s'évanouissaient à leur arrivée sur la plage à cause de la peur et du stress. D'autres portaient de jeunes enfants dans leurs bras. Des milliers de personnes sont actuellement bloquées à la frontière entre l'ancienne République yougoslave de Macédoine et la Grèce. Les femmes sont en danger car des milliers de personnes se retrouvent là, sans véritable organisation.    



Quelles conditions les États membres devraient-ils proposer aux femmes ? 

 

Mary Honeyball : L'accompagnement est absolument essentiel pour les femmes victimes de traumatismes. Il faut également proposer des cours de langue ainsi que des gardes d'enfants, parce que toutes les femmes ne souhaitent pas que leurs enfants entendent ce qu'elles disent lors de leurs entretiens pour des demandes d'asile. Il faut aussi des enquêtrices et des interprètes femmes. Beaucoup de ces femmes ne se livrent pas facilement en présence d'un homme. Dans les centres-mêmes, il faut des sanitaires séparés et des séparations entre hommes et femmes, sauf s'il s'agit d'une famille qui souhaite rester ensemble. Dans l'un des centres que j'ai visité à Munich, il y avait un café pour femmes, un véritable espace pour elles.


Marie Dorigny : J'ai eu l'occasion de photographier ce café. Les femmes adorent cet endroit !


Mary Honeyball : Je pense qu'il s'agit simplement de faire preuve d'un peu de sensibilité. Ces choses ne sont au final pas si compliquées à mettre en place.


Marie Dorigny, vous choisissez des sujets très sérieux pour vos reportages. Vous laissez-vous influencer par vos sensibilités personnelles ? 

 

Marie Dorigny : Je choisis de plus en plus les sujets que je souhaite couvrir. Je veux couvrir ces thématiques parce que je me sens concernée, je me sens impliquée, parce que je pense que je devrais faire partie de ces personnes qui essayent de faire bouger les choses. Nous travaillons toutes les deux main dans la main : Mary Honeyball travaille sur l'aspect politique et je produis un reportage-photo autour de la question.


Les femmes font l'objet de discriminations même après avoir obtenu le statut de réfugiée. Que faire pour faciliter leur intégration dans la société ? 


Mary Honeyball : Ces femmes doivent vraiment être préparées pour l'intégration : elles doivent prendre part à des cours de langues et à des formations. Certaines d'entre elles ont déjà travaillé dans le passé, d'autres non. La préparation de ces femmes à l'emploi, si c'est ce qu'elles souhaitent, est donc un enjeu crucial.  


Marie Dorigny : La question de la vie dans les centres et de l'intégration des réfugiés pourrait faire l'objet d'un autre projet. L'accès à ces centres devient très difficile pour les journalistes. On nous empêche de témoigner autour de la question.


Le centre des visiteurs du Parlement européen à Bruxelles, le Parlamentarium, accueille jusqu'au 1er juin 2016 l'exposition « Déplacées : les femmes réfugiées et demandeuses d'asile dans l'Union », une collection de photographies prises par Marie Dorigny. 

 

Ses photographies seront également exposées dans les différents États membres : cliquez ici pour plus d'informations.

Article - Droits de la femme/Egalité des chances / Immigration / Politique d'asile − 04-03-2016 - 11:00

 

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