Quelle crédibilité pour l'Europe sur la scène internationale?
Au moment où se multiplient les défis auxquels est confrontée la communauté internationale, l'Europe semble impuissante à apporter une contribution active et efficace permettant de mettre ses valeurs en accord avec ses actions concrètes.
Il y a une semaine, les pays européens poussaient un "ouf" de soulagement après l'échec du parti d'extrême-droite aux élections présidentielles en Autriche. En effet, l'arrivée d'une personnalité du FPÖ au palais de la Hofburg à Vienne eut constitué une gifle majeure aux valeurs défendues par l'Union européenne.
L'Autriche n'a pas bousculé, mais après ?
Un véritable réflexe citoyen a permis au candidat indépendant issu des écologistes de remporter de justesse cette élection.
Mais à la suite de ce qui vient de se passer, il appartient de nouveau aux dirigeants politiques de l'Union européenne de réfléchir à une nécessaire refondation de l'Europe. Il n'est en effet pas possible de porter haut et fort des messages de tolérance sur la scène internationale si, élections après élections, les partis populistes d'extrême-droite, porteurs de messages racistes et d'exclusion, remportent succès sur succès, comme il en est allé en Allemagne lors des élections régionales et en Autriche lors de l'élection présidentielle. La France pourrait constituer un autre cas de progression du Front national en 2017...De l'autre côté de l'échiquier, la progression de l'extrême-gauche comme en Espagne ou son arrivée au pouvoir comme en Grèce, ont démontré une insatisfaction profonde vis-à-vis de la gouvernance européenne.
Certes, la vie démocratique comporte ses aléas électoraux. Toutefois, il est tout aussi certain que cette progression des partis extrêmes affaiblit l'Europe sur la scène internationale. Il devient ainsi moins aisé, tant pour les dirigeants de l'Union que nationaux, de prendre des initiatives lorsqu'ils sont à ce point affaiblis chez eux...ils deviennent moins crédibles et sont même parfois l'objet de sarcasmes de dirigeants étrangers, à commencer par le président des États-Unis qui, à quelques mois de la fin de son ultime mandat, ne manque pas de dire tout haut ce qu'il devait penser plus bas avant...
L'Europe inexistante sur le Venezuela
Pourtant, l'Europe dispose incontestablement de la capacité de faire entendre sa voix sur la cène internationale. Mais, par exemple, alors que le Venezuela sombre dans le chaos, nous n'avons pas entendu l'Europe prendre position sur la situation de ce pays.
Malgré la victoire de l'opposition lors des élections législatives du mois de décembre dernier, le président Nicolas Maduro a décidé de s'enfermer dans une logique autoritaire et a très récemment déclaré l'état d'urgence. Sur le plan économique et social, le pays est en proie à des souffrances incroyables qui sont dues en grande partie à l'incompétence du parti au pouvoir depuis Hugo Chavez qui, par une gestion dans la pure ligne marxiste léniniste, a conduit le pays au bord de l'explosion sociale.
Un récent reportage de la chaîne de télévision Skynews a ainsi monté la pénurie de tout médicament et de denrées alimentaires de première nécessité dans un pays pourtant très riche en pétrole, mais dont l'écroulement du prix a contribué à la crise, enfin des cadavres obligés d'être stockés dans les couloirs de hôpitaux de Caracas faute de disposer d'électricité pour faire fonctionner les chambres froides. L'Europe ne devrait-elle pas ici proposé en urgence une aide humanitaire en partenariat avec d'autres pays européens ? Une initiative franco-allemande ne serait-elle pas judicieuse pour montrer la capacité de l'Union à intervenir sur un autre continent en lien avec les valeurs qu'elle défend ? Nous n'avons hélas rien vu venir, même si la crise des réfugiés l'a monopolisée ces derniers mois.
Le conflit israélo-palestinien
Dans un ensemble qui s'est construit sur les ruines de la guerre et alors que la paix a constitué le sens même de la construction européenne sur la base des solidarités de fait chères à Jean Monnet, l'Europe n'est pas plus en situation d'intervenir sur le cours du conflit israélo-arabe. Alors que l'Union européenne constitue le premier contributeur net de l'Autorité palestinienne, l'Europe est complètement inaudible s'agissant du conflit israélo-arabe.
L'Europe n'est pas à même, à quelques jours de l'initiative française d'une conférence internationale, de proposer des initiatives crédibles. Les pays européens se heurtent d'ailleurs à la même difficulté.
A moins de quinze jours d'intervalle, le ministre français du développement international et le Premier ministre se sont vus opposés une très sèche fin de non-recevoir, voire un camouflet, de la part du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu quant à cette initiative. La visite de Manuel Valls est d'ailleurs intervenue alors que l'entrée au gouvernement comme ministre de la défense du dirigeant nationaliste très contesté Avigdor Lieberman était déjà actée, menaçant d'ailleurs la coalition au pouvoir à Jérusalem.
Cette rebuffade opposée aux dirigeants français intervient après que la France eût apporté son soutien à une résolution de l'Unesco au mois d'avril évoquant la "Palestine occupée"...
Quoi que l'on pense de cette résolution, que le président de la République François Hollande semblerait ne pas avoir approuvée (sic !), celle-ci révèle de nouveau de graves failles dans la cohérence et la solidarité européennes puisque tant l'Allemagne que le Royaume-Uni, en accord avec les États-Unis, ont voté contre...
Cette incohérence semble aujourd'hui coûter cher à la France et à l'Europe alors qu'au fond, on ne peut contester sa volonté de tout faire pour parvenir à une solution diplomatique qui pourrait satisfaire les deux parties en guerre. Il s'agit de permettre tant à Israël qu'aux palestiniens de vivre en paix dans des frontières sûres et reconnues sur le plan international, de condamner les violences et exactions, ainsi que les actes terroristes commis par les extrémistes, notamment du Hamas, contre Israël.
La relance et la refondation de l'Europe passe donc par une indispensable réflexion sur son action internationale de nature à assoir enfin sa crédibilité.